Dans le trombinoscope des auteurs de polar français « qui comptent », il y a très certainement Alexandre Dumal (ça n'est pas son vrai nom bien entendu, est-ce Jean-Bernard Pouy, adepte du calembour plus ou moins fin qui lui a déniché ce nom de code ?). Au regard de ce petit bouquin qui se lit en à peine un Rouen-St Lazare on pourra constater que Dumal ne se laisse pas emporter par son inventivité syntaxique évidente, ni par le lyrisme débordant propre aux (ex-) mauvais garçons qui ont tellement de choses à raconter. Car Dumal, qui fut adoubé par Manchette lui-même pour cette bonne raison-là, a vécu des choses, a connu la prison, rencontré de drôles de gens.
Ce qui saute aux yeux à la lecture du bouquin est presque trop évident pour qu'on prenne la peine de le souligner : Dumal est un auteur de nouvelles exceptionnel. La première partie intitulée « Un beau brin de brune » vaut à elle seule la lecture du livre, tant l'écriture serrée et précise tend à rendre de manière intacte les pulsions et sensations diverses liées à un authentique fait divers suivi, dans la foulée, d'un coup de foudre amoureux imprévu.
Ça coince, en revanche, dans la construction globale du roman, puisque Dumal a accolé deux nouvelles en ne lésinant pas sur la super-glue, en laissant le soin au hasard de boucher les trous, au destin de tout résoudre, et à la bonne fée des personnages de se charger du reste. C'est sûr que à une époque où tout bon polar se doit d'être machiavélique et de respecter à la lettre un « plan de travail », lire En deux temps trois mouvements offre une bonne bouffée d'air frais. Car au fond, derrière sa volonté affirmée de ne pas faire dans le réalisme, Dumal offre aux protagonistes de son histoire ce qui manque le plus à la vie-même, et à celle des mauvais garçons en particulier ; des portes de sortie, une bonne étoile, un happy-end.