La légende raconte que René Brabazon Raymond, alias James Hadley Chase, courtier en librairie né le 24 décembre 1906, écrivit son premier roman, en six week-ends à l’aide d’un dictionnaire d’argot américain. Consciencieux, ayant l’habitude de lire les ouvrages qu’il vendait, le jeune homme avait noté l’engouement du public anglais pour les récits de gangsters et s’était intéressé aux œuvres de Steinbeck, Faulkner ou Hemingway ainsi qu’à la nouvelle vague hard-boiled illustrée par les ouvrages de Dashiell Hammett. Pas d’orchidées pour Miss Blandish, classique absolu et n° 3 de la mythique Série noire, devient très vite un fleuron de la collection imaginée en 1945 par Marcel Duhamel. Il est suivi en 1948 par La Chair de l’orchidée qui enfonce le clou doré du succès. Chase, devenu écrivain professionnel, publie un autre immense classique, Eva, en partie inspiré de l’interview d’une prostituée. Sa carrière est lancée. Près de quatre-vingt-dix romans suivront. Refusant le récit psychologique au profit de l’action comme étant le meilleur moyen de cerner les personnages, Chase s’impose par la noirceur de ses intrigues. Dans Pas d’orchidées pour Miss Blandish, une riche héritière tombe entre les mains d’un sadique puéril et malsain. Vingt ans plus tard, c’est au tour de l’enfant née de cette période, démon dans l’enveloppe charnel d’un ange, d’être la proie d’une autre sorte de traque. La malédiction Blandish perdure. Un demi-siècle plus tard, cela reste tout aussi fort : un patrimoine commun.