Couto et son groupe, le Super Mama Djambo eurent leur heure de gloire, dans la Guinée-Bissau des années 70, au lendemain de la guerre d’indépendance, un groupe qui incarnait la flamme nationale de tout un peuple. Tout cela est désormais bien loin, mais la mort de Dulce, chanteuse du groupe, aux yeux de braise et à la voix de velours, va raviver les souvenirs. Couto va arpenter les rues de sa ville, Bissau, pour retrouver ses vieux potes musiciens et leur apprendre la nouvelle, ces hommes qui sont encore des héros et que l’on surnomme affectueusement « les grands ». Ensemble, ils vont préparer un concert d’hommage à Dulce.
Les déambulations de Couto sont aussi l’occasion de revisiter le passé, revivre les années de lutte dans l’armée rebelle qui libéra le pays de la tutelle portugaise, les années glorieuses des tournées à travers le monde, les années passionnées de sa vie avec Dulce. En toile de fond se dessine l’histoire de la Guinée Bissau, qui au lendemain de l’indépendance rêvait d’une vie de prospérité et de liberté, des rêves qui furent bien vite confisqués par « les bouffeurs », hommes politiques avides et corrompus, valets des narcotrafiquants et marionnettes des militaires.
Une déambulation qui prend la forme de la saudade à la portugaise, une mélancolie joyeuse et désabusée, mélange d’autodérision collective et de fierté bafouée. La fierté guinéenne, elle, n’est pas morte et s’incarne dans cette belle jeunesse que Couto croise au coin des rues : voyous flamboyants prêts pour la lutte, filles insolentes prêtes pour l’amour, rappeurs arrogants prêts pour la gloire.
Un roman envoûtant comme un goumbé, qui colle des frissons, et dont la plume évocatrice et musicale, mélange de créole et de français, restitue toute la sensualité de l’Afrique : chaleur et moiteur, odeurs et saveurs, rythmes et percussions.