D. comme Dorine, l’épouse d’André Gorz, le philosophe. Une femme qui lui a ouvert les portes de l’amour, avec qui il a partagé sa vie, ses aspirations, ses idées politiques, ses envies de changement de société. Une femme aimante et aimée, volontaire, cultivée qui a su respecter ses enfermements d’écrivain, une femme qu’il résume en ces mots : « en me donnant Toi, tu m’as donné Je. » Dans cette lettre, écrite entre le 21 mars et le 6 juin 2006 et sous-titrée "Histoire d’un amour", André Gorz réhabilite le rôle de Dorine dans sa vie, une place centrale pourtant négligée dans ses livres : « Pourquoi es-tu si peu présente dans ce que j’écris alors que notre union a été ce qu’il y a de plus important dans ma vie ? » Et Gorz déroule le fil de leur histoire, de la rencontre aux dernières années, s’interrogeant avec culpabilité sur le portrait peu flatteur et erroné qu’il a dressé de Dorine dans son livre majeur "Le Traître".
Lettre à D. est un texte court et intense, le cri d’un amour inconditionnel fait de sentiments, de chair et d’intellect partagé pendant près de soixante ans. « Nous aimerions chacun ne pas avoir à survivre à la mort de l’autre. Nous nous sommes souvent dit que si, par impossible, nous avions une seconde vie, nous voudrions la passer ensemble » : ainsi se clôt cette lettre d’amour. On ne saura jamais si André Gorz et Dorine continuent à s’aimer dans un autre ailleurs mais ils ont choisi de quitter ensemble cette vie-ci en 2007 : André Gorz et sa femme se sont suicidés à 84 ans alors que Dorine luttait contre une grave maladie qui allait bientôt l’emporter.