Nous sommes en 1947 et Stingo est notre très jeune narrateur. Aspirant écrivain venu du sud des États-Unis, il rencontre à New York un couple qui immédiatement le séduit, Sophie et Nathan. Ils ont la trentaine, ils sont d’une très grande beauté, ils sont drôles, cultivés, brillants et intéressants, il est ébloui et comblé quand ils le prennent sous leur aile. Ils sont aussi hélas tous deux très abîmés et instables; Nathan est schizophrène et se drogue, Sophie est une rescapée d’Auschwitz.
Ça finit très mal.
C’est un roman imparfait qui est aussi profondément captivant. En 1976, le politiquement correct n’avait pas encore fait son apparition et il est empli d’aspérités, il heurte – ça participe à son pouvoir. Il explore la notion du mal dans tous ses sens et ses horribles incarnations, avec violence, mais la plume très bavarde de Styron fait un tel usage du détail que l’on a une impression de totale évidence. Paradoxalement c’est très facile à lire, ce qui fait que la portée dramatique explose : on se prend vraiment durement la densité de l’horreur en pleine figure.