Peu de notions sont plus ambiguës que l’ « opinion publique ». Familière, elle est utilisée au quotidien par les journalistes, les acteurs politiques, et invoquée via un outil comme le sondage. Elle suppose qu’il serait possible d’accéder à une vision globale, même floue, des attentes sociales d’un peuple ou d’un groupe d’individus. Mais comment saisir, ordonner et faire parler des opinions ? Le travail de collecte n’est-il pas déjà « bricolage » de l’opinion ? Toutes les opinions sont-elles bonnes à entendre ? Peut-on, et doit-on, recenser et cartographier la manière dont des millions de personnes appréhendent les sujets les plus divers ? Derrière l’opinion publique se cache donc la question du droit à parler et à être écouté(e) dans l’espace public, question intimement liée aux aspirations démocratiques des individus et des peuples. Dans cette synthèse de grande ampleur historique, les auteurs font la démonstration qu’il existe bien des « régimes d’opinion », c’est-à-dire des configurations sociales et historiques spécifiques, dans lesquelles une opinion publique trouve à se lire et à s’exprimer. Du journal au réseau social, en passant par le sondage ou la surveillance d’état, ce sont aussi les évolutions jusqu’à aujourd’hui de la culture politique des démocraties occidentales qu’explore cet ouvrage.