Littérature contemporaine

Ce court roman de l'autrice espagnole Milena Busquets a des accents modianesques, mais il est surtout très réussi. La narratrice est une autrice quadragénaire qui vit à Barcelone. Elle a deux fils, un de 17 ans et un autre de 11 ans, et une relation avec un acteur de théâtre très séduisant. Les hasards de l'existence vont, par l'intermédiaire d'un lieu, lui rappeler son amie d'enfance morte à 15 ans. Gema était une jeune fille solaire et brillante dont la narratrice s'était éloignée ado.

Le roman est fascinant. Il s'agit d'une œuvre qui aborde avec une parfaite subtilité l'Amnistie post-franquisme. Je ne pense pas avoir lu un roman qui rende aussi bien compte des conséquences de la guerre et de la dictature, et de ce qui a suivi. Mais Marías ne se contente pas de livrer un roman politique ou sociologique, il mêle sans cesse l'intimité et l'histoire. Il revient sur ses obsessions pour le couple, le secret, le mensonge, la trahison, la justice et le pardon possible ou impossible.

Je découvrais avec ce court roman la plume d'Anne Delaflotte-Mehdevi qui m'a séduite. Fluide et alerte, elle retranscrit à merveille les milliers de couleurs qu'apprivoise Marguerite dans son atelier mais aussi ses sentiments souvent tourmentés. Moi qui ne connaissais rien à l'enluminure en ressort charmée avec l'impression d'avoir appris beaucoup de choses. On sent la passion de l'autrice pour les livres et leur fabrication. Un magnifique portrait de femme, inspirant et lumineux.

Premier roman d'Annie Ernaux, ce récit de jeunesse ne peut laisser indifférent. L'autrice y dévoile la déchirure qui a marqué sa propre enfance, ce moment où elle s'est sentie tiraillée entre le monde poisseux du café-épicerie que tiennent ses parents et celui, séraphique et inaccessible, de la bourgeoisie. Ce roman est aussi, comme toujours avec Annie Ernaux, une lettre d'amour à la littérature qui l'a sauvée, élevée, qui "l'arrache à elle". Un chef d’œuvre.